Suite de la série «Mystères et transcendance» consacrée à l’article de Jean-Claude Émériau paru dans la revue philosophique Matières à penser.

Voir le volet précédent.

«Le regard de la chair ne peut pas voir l’esprit!
Le cercle sans limite en qui tout est inscrit
Ne se concentre pas dans l’étroite prunelle

Alphonse de Lamartine, La Chute d’un Ange – huitième vision, fragment du livre primitif, 1838

Les grottes de Barabar, dans l’État du Bihar en Inde (à 24 km au nord de Gaya) constituent un des plus grands mystères des temps anciens. Aussi appelées sat graha, les sept grottes, elles dateraient, nous dit-on, de l’époque maurya, au quatrième siècle av. J.‑C. Quatre sont creusées dans la colline de Barabar, et trois autres dans un chaos granitique de la colline Nagarjuni à 1,6 km des premières.

Elles ont entre autres abrité pendant un certain temps des ascètes du mouvement bouddhiste ajivika, fondé par Makkhali Gosala, un contemporain de Bouddha Gautama, le fondateur du bouddhisme, et de Mahavira, le 24e et dernier tirthankara du jaïnisme. L’occupation de grottes naturelles par des ascètes bouddhistes est d’ailleurs un fait reconnu par les historiens, qui datent les débuts de cette pratique au 5e siècle av. J.‑C. Quant aux grottes de Barabar, on y trouve plusieurs inscriptions bouddhistes et hindoues, ainsi que quelques sculptures de périodes ultérieures.

«Ces grottes taillées dans le granit, avec des murs dont la perfection est digne d’un poli miroir, suscitent peu d’intérêt pour les archéologues et historiens, alors qu’il s’agit d’un véritable out of part, c’est à dire un artefact anachronique de l’histoire, bref un truc qui ne devrait pas exister.»

Quentin Leplat  – www.messagedelanuitdestemps.org/barabar-un-des-plus-grand-mystere-des-temps-anciens/

Ces grottes, qui mesurent entre 50 et 60 m², sont taillées dans le monolithe granitique en une salle rectangulaire avec une voûte en berceau, parfaite portion de cylindre. Les extrémités peuvent être arrondies et surplombées d’un dôme, voire donner accès, dans la grotte Sudama, à une seconde salle cylindrique au dôme en cône tronqué surplombé d’une portion de sphère, évoquant les chœurs et nefs de nombreux édifices religieux, dont temples et cathédrales. La perfection des murs comme des plafonds de ces grottes représente une prouesse technique inimaginable, que ce soit pour l’époque ou même encore pour des tailleurs de pierre modernes.

«Les surfaces sont partout aussi lisses qu’une vitre. Les parois latérales sont très légèrement inclinées, ce qui neutralise l’effet d’écho au profit de la résonance. On observe des effets particuliers de propagation et d’amplification du son dans ces chambres. Jamais plus dans l’histoire une pareille prouesse ne sera égalée, ni dans l’Inde, qui a pourtant réalisé de nombreuses grottes, ni ailleurs sur la planète. Ce qui soulève des questions…»

Quentin Leplat, ibid. «Barabar en cinq minutes, grottes de méditation ou dispositif inconnu?»

Pourquoi pareille prouesse
pour de simples salles de méditation?

Que ces sept grottes soient taillées dans une pierre aussi dure que le granit, avec des mesures, une géométrie et une précision dignes d’un horloger suisse, constitue déjà un exploit. Mais qu’en plus les murs présentent un véritable poli miroir digne du Palais des glaces nous plonge dans les mystères les plus étonnants de l’histoire, selon de nombreux chercheurs.

D’ailleurs, un grand nombre d’entre eux n’hésitent plus désormais à comparer le mystère qui entoure la construction de ces grottes de Barabar à celui des grandes pyramides d’Égypte, des moaïs (statues monumentales) de l’île de Pâques, ou de la citadelle inca du Machu Picchu au Pérou. Ces sites nous laissent bouche bée face aux plus grands mystères de l’histoire de l’humanité, et intéressent au plus haut point toutes sortes de chercheurs pour les secrets insoupçonnés qu’ils pourraient livrer un jour.

«La vérité a besoin de mystère pour se protéger des humains», fait dire Christian Jacq au grand hiérarque d’Héliopolis dans Horemheb, le retour de la lumière.

Quentin Leplat, chercheur en astrogéométrie et en métrologie préhistorique, auteur de livres tels que Kahun, la règle astronomique d’Égypte ou Le réveil des dragons, évoque au sujet de ces grottes la grande pyramide de Khéops, dont il dit:

«Le trésor de la chambre n’est pas le contenu, mais le contenant. De par ses dimensions et ses proportions, c’est un trésor de connaissance qui échappe au regard matérialiste […] C’est exactement la même chose avec les grottes de Barabar en Inde. La précision fantastique de ces grottes fait partie du trésor. Ce que l’on a déposé à l’intérieur importe peu, c’est le contenant qui est le secret. En ce sens, ces grottes se font les miroirs de l’être humain, dont l’intérieur importe plus que l’enveloppe dans laquelle nous vivons.»

Dans le cas des grottes de Barabar comme d’autres sites du monde, il y a beaucoup de choses troublantes qui viennent d’un passé lointain et dont les chercheurs veulent à tout prix percer les secrets, s’efforçant de les quantifier, de les rationnaliser, de les réduire à des modélisations à l’aune de la science moderne, mais dont le mystère nous laisse en totale admiration.

«La métrologie moderne ne sert qu’à compter et mesurer, explique Quentin Leplat. Celle des anciens était en lien avec la terre et le ciel, avec l’humain et son environnement, tel un dénominateur commun, socle de l’univers observable. À Barabar, vous découvrirez donc une nouvelle unité de mesure que j’ai déterminée à 85,405 cm […] Évidemment, ce “yard de Barabar” est en lien avec des unités de mesure employées en d’autres endroits du monde. Toutes les grandes unités de mesure antiques sont interconnectées avec des principes mathématiques, géométriques, numériques et astronomiques d’une telle simplicité qu’elles révèlent une conception de la métrologie bien plus sophistiquée que la métrologie moderne.»

Mystère des mystères

Le mystère interroge, bien sûr, mais il fascine toujours autant, et dans cette fascination interviennent tout naturellement les forces de l’esprit que l’on ne voit pas mais qui n’en sont pas moins toujours en action. Pour illustrer ce point à la lumière des Védas, traduisons cet aphorisme très souvent cité par les grands maîtres: anor aniyam mahato mahiyan, «Dieu est plus petit que le plus petit et plus grand que le plus grand.» A. C. Bhaktivedanta Swami explique que l’âme spirituelle relève de l’infiniment petit, les Upanishads la disant de la taille d’un dix-millième de la pointe d’un cheveu. Et Dieu, plus grand que le plus grand, est dit être plus petit encore que le plus petit, car il siège dans le cœur de cette âme infinitésimale sous la forme du Paramatma , de l’Âme suprême présente en chaque être.

«Je me tiens dans le cœur de chaque être et de moi viennent le souvenir, le savoir et l’oubli.»

Bhagavad-gita 15.15

«Le sage qui connaît pleinement la Vérité absolue la réalise en trois phases. Ces trois aspects qui désignent une seule et même réalité ont pour nom Brahman, Paramatma et Bhagavan.»

Shrimad-Bhagavatam 1.2.11

À vrai dire, que pourrait-il bien y avoir de plus mystérieux que la présence de l’Âme suprême dans chaque particule de matière et dans le cœur de chaque être, sinon la raison même de cette présence? Les Védas expliquent en effet que la raison n’en est autre que l’amour que Dieu porte aux êtres vivants, et que son unique intention est de les voir revenir à lui pour toujours. Ainsi les accompagne-t-il en témoin impartial de leurs actes dans chacune des incarnations qu’ils traversent au gré de leur karma durant leurs séjours temporaires dans la matière.

À suivre…

Le mystère de Barabar